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L’éternel pouvoir : quand l’Afrique vote pour l’immobilité

Quentin Règles

Un article de

Ismaïl Omar Guelleh vient d’annoncer sa candidature à un sixième mandat. Vingt-six ans à la tête de Djibouti, une opposition étouffée, des élections sans surprise, et toujours la même promesse : “garantir la stabilité du pays”. Le scénario n’étonne plus personne. Il s’inscrit dans une longue tradition du pouvoir perpétuel, celle qui transforme la fonction en destin, et le mandat en patrimoine personnel.

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Guelleh n’est pas seul. Paul Biya règne sur le Cameroun depuis 1982, Yoweri Museveni sur l’Ouganda depuis 1986, Paul Kagame sur le Rwanda depuis 2000, et Denis Sassou Nguesso sur le Congo depuis 1979, avec une brève parenthèse. Le plus souvent, la Constitution s’efface devant le désir de continuité : on modifie les articles, on “réinitialise” les mandats, on invoque la volonté du peuple. Les urnes servent de décor à un système verrouillé.


Selon Freedom House, seuls huit pays d’Afrique subsaharienne sont aujourd’hui considérés comme des démocraties. Ailleurs, la longévité tient lieu de programme.


Même au nord du continent, le pouvoir ne circule qu’en apparence. En Algérie, Abdelaziz Bouteflika avait prolongé son règne jusqu’à l’immobilité complète, incapable de parler mais toujours “président”. Son successeur, Abdelmadjid Tebboune, élu en 2019 après un soulèvement populaire inédit, promettait la rupture ; il n’a offert que la continuité. Même façade démocratique, même élite militaire en coulisses, même peur du changement réel. Au Maroc, la monarchie se modernise sans se transformer, concentrant encore l’essentiel des décisions entre les mains du roi. Le modèle démocratique occidental n’a pas seulement vieilli : il a été renié. Le vote demeure, mais la rotation disparaît. Le XXIᵉ siècle, censé être celui de la transparence, est devenu celui du contrôle sans fin.



La mise en scène du pluralisme


Sur le papier, tout est démocratique : bulletins, observateurs, commissions électorales. Dans la réalité, tout est cadenassé. Les opposants sont marginalisés, parfois arrêtés, les médias publics transformés en instruments de propagande, la justice mise au pas. Les campagnes électorales deviennent des processions : on y chante la fidélité, on y redoute la vacance. “La stabilité est un bien plus précieux que la liberté”, expliquait Museveni à Kampala, en 2016. Une phrase symptomatique de cette philosophie du pouvoir paternaliste : mieux vaut un père autoritaire qu’un héritier incertain. Le peuple, fatigué des promesses, vote pour la paix sociale. La démocratie devient un rituel sans enjeu.



La France, de tutrice à figurante


Pendant des décennies, Paris a tenu la carte de l’Afrique comme une extension de son propre pouvoir. De Gaulle parlait de “coopération”, Mitterrand de “responsabilité partagée”, et Jacques Chirac d’“amitié sincère”. Ce dernier incarnait encore une forme de respect affectif, capable de dialoguer avec Mandela ou Desmond Tutu sans arrogance. L’époque voulait croire que la France restait une puissance morale...


Puis vint la rupture. En 2007, Nicolas Sarkozy prononça à Dakar un discours resté célèbre : « L’homme africain n’est pas assez entré dans l’Histoire. » Une phrase désastreuse, qui brisa d’un mot des décennies d’efforts diplomatiques. François Hollande, lui, choisit la neutralité molle : ni vision, ni politique. Il promettait une “relation apaisée”, sans jamais la définir. Il fut inerte, absent, au pire moment : celui où les influences extérieures s’affirmaient davantage, où la Russie, la Chine et la Turquie avançaient leurs pions là où la France se taisait.


Puis vient Emmanuel Macron. Incongru, tutoyant, méprisant davantage. Il a voulu rompre avec la Françafrique en prétendant “parler d’égal à égal”. Mais ses visites, souvent perçues comme des interminables cours magistraux, ont renforcé le sentiment d’arrogance. Au Burkina Faso, face à des étudiants médusés, il lança : « Je ne veux pas m’occuper de l’électricité dans les universités du Burkina ! » Résultat : la France n’a plus ni réseaux, ni relais, ni respect. Elle a perdu l’influence que son paternalisme lui assurait, sans acquérir la légitimité qu’un vrai partenariat aurait créée. 



Les causes profondes d’un échec annoncé


L’Afrique ne manque pas d’intelligence politique ; elle manque de socle institutionnel. Ses États sont nés de frontières tracées à la règle, sans tenir compte des peuples ni des langues. Les constitutions copiées sur les modèles occidentaux n’ont jamais trouvé d’ancrage local. Les classes moyennes, garantes d’un pluralisme durable, restent embryonnaires. Et la dépendance économique à l’aide internationale entretient une relation infantilisante : les gouvernements obéissent à leurs bailleurs, non à leurs citoyens. Enfin, la symbolique du chef reste intacte : dans beaucoup de cultures, le dirigeant n’est pas un élu, mais un père. Le contester, c’est rompre l’ordre. C’est pourquoi les changements de régime en Afrique se font rarement par les urnes, mais souvent par les casernes.



Après la désillusion, le tournant


Pourtant, une autre Afrique monte. Celle des villes, de la jeunesse et du numérique. Elle ne veut plus qu’on parle d’elle en termes de misère ou de dépendance. Elle s’informe, s’indigne, se mobilise. Elle n’attend plus la France, ni personne d’ailleurs. Elle veut du travail, de la dignité, des dirigeants qui rendent des comptes. Les coups d’État récents au Sahel traduisent cette impatience confuse : ils renversent des régimes corrompus, sans toujours mieux gouverner. Mais ils expriment la même soif d’émancipation.


L’Afrique n’a pas besoin d’un sauveur, elle a besoin de se sauver d’elle-même. Et la France, si elle veut exister encore, devra enfin comprendre qu’on ne dialogue pas avec un continent en lui parlant de morale, mais en lui parlant d’avenir.

Car la politique n’est pas le royaume des narcissiques, mais celui des visionnaires.



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Il y a ceux qui accèdent au pouvoir comme on monte un escalier, et ceux qui s’y installent comme dans un tombeau. L’Afrique en compte plusieurs, mais ce mal n’a pas de continent : il s’appelle la peur du vide. Quand un chef s’identifie à la nation, le départ devient une mort. Et plus l’État faiblit, plus il se persuade qu’il doit rester.

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