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Frida Kahlo : combien vaut une douleur ?

Igor Sifensarc

Un article de

Le 20 novembre, un tableau de Frida Kahlo sera vendu, à New York, pour une somme qui pourrait frôler les 60 millions d’euros.

Le Rêve (La chambre) : une œuvre que nous ne pouvons pas publier... nous n’en avons pas les droits.

Frida y raconte l’intimité, la fragilité, la nuit, le lit d’une femme qui a trop souffert.

Quel est le prix de la douleur ?

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Igor Sifensarc

Il y a des vies qui ressemblent à des incendies.

Chez Frida Kahlo, le feu était partout : dans le corps, dans le cœur, dans les couleurs.

Elle disait : « Je ne peins pas mes rêves. Je peins ma réalité. »

On savait alors qu’on n’en sortirait pas indemne.


Et voilà qu’en 2025, un de ses tableaux surgit en salle des ventes, escorté par des gants blancs et des experts parfumés, estimé entre 40 et 60 millions d’euros.

Quarante millions… pour une douleur.

Soixante, peut-être, pour une vie brisée.

L’indécence, parfois, porte un marteau d’enchères.



Une femme debout dans un corps brisé


On connaît son histoire : l’accident de bus, les barres de métal qui lui transpercent la colonne, les cinquante-cinq opérations, les corsets de plâtre peints comme des armures.

Son corps devient une carte des confins, un territoire bombardé où elle apprend pourtant à marcher, à aimer, à peindre.


Julie Taymor, dans son magnifique Frida (2002), filme cet instant où Salma Hayek, étendue comme crucifiée, découvre dans un miroir fixé au-dessus de son lit un visage qu’elle ne reconnaît pas.

Le monde autour s’effondre, mais ses yeux restent immobiles, comme deux chiens de garde.

Frida peint son autoportrait… pour ne pas disparaître, pour se tenir compagnie, pour renaître.

Et c’est peut-être, au fond, la plus belle définition de l’art.



Diego : amour immense, trahisons infinies


Puis vient Diego Rivera.

Génie monumental, ogre barbu, cœur vaste comme une cathédrale et mœurs d’ouverture permanente.

Le film le montre sans détour : cet homme qui l’admire, la protège, la blesse.

Cette scène où Frida, désespérée, découvre qu’il l’a trompée avec sa sœur Cristina.

On la voit reculer, silencieuse, comme si chaque pas ouvrait une nouvelle fracture.

Elle murmure plus tard, dans une phrase tirée de ses lettres :

« Je t’aime plus que ma propre peau. »

Et l’on comprend que c’est cela, précisément, l’enfer.


Diego l’a trahie.

Elle a riposté parfois, mais jamais à armes égales.

Leur histoire n’était pas un pacte : c’était une démesure.

Frida aimait avec une capacité de douleur infinie... une endurance que Diego ne comprit jamais.

Lui n’offrait que ses élans. Pour elle, le cœur aurait suffi.




L’univers de Frida : sang, fleurs, animaux, éclats


Frida peint comme on respire quand l’air manque : avec violence, avec urgence.

Les singes, les colibris, les cœurs arrachés, les larmes qui ressemblent à des couteaux.

La palette mexicaine - ces rouges incendiaires, ces bleus électriques, ces jaunes brûlants - sature l’espace.

Dans le film, Julie Taymor insère des tableaux qui s’animent, des décors qui se fissurent, des murs qui respirent.

Les couleurs débordent du cadre : comme si l’âme de Frida refusait elle-même d’être mise sous verre.

On ne peut pas filmer Frida : il faut l’halluciner.



Et maintenant ? On vend la souffrance.


Alors, comment passer de cette vie, de cette femme, de ce corps martyrisé…

à une salle climatisée où l’on brandit des dizaines de millions d’euros ?

Quel est ce monde où la douleur devient un investissement ?

Où la blessure devient valeur refuge ?

Où la biographie d’une femme assassinée par la vie devient un produit financier ?


Le marché de l’art a ceci de pervers qu’il transforme la souffrance authentique en spectacle rentable.

Frida peignait pour vivre... parfois littéralement.

Aujourd’hui, on paie l’équivalent d’un hôpital entier… pour accrocher sa souffrance dans un salon.

Elle écrivait :

« Je suis née pour souffrir. Je suis née pour peindre. »

Elle n’a jamais ajouté : « …et pour enrichir vos portefeuilles. »



Van Gogh, Ferrat… et la prison de l’or


Et comment ne pas penser ici à un autre martyr de l’art, Vincent Van Gogh, lui aussi mort pauvre, lui aussi transformé en lingot posthume ?

Jean Ferrat lui consacra Les Tournesols, une chanson à réécouter tant elle dit l’indécence du marché :

👉 Les Tournesols à l'air penché


Et ces mots résonnent encore aujourd’hui :

« Tu valais rien au hit-parade, ni à la une des journaux

Toi qui vécus dans la panade sans vendre un seul de tes tableaux

Mais dans un coffre climatisé au pays du soleil-levant

Tes tournesols à l’air penché dorment dans leur prison d’argent. »


Van Gogh, Frida : mêmes blessures, même solitude, même récupération glaciale.

On séquestre leurs couleurs dans des coffres.

On piège leurs âmes dans des banques.



L’argent tente toujours d’acheter une vertu qu’il détruit


Le paradoxe entier est là.

Frida Kahlo devint une icône underground, féministe malgré elle, révolutionnaire sous morphine, libre malgré les corsets.


Le marché de l’art, lui, récupère tout ce qu’il peut : le mythe, le visage, les fleurs dans les cheveux, la douleur - surtout la douleur.


À vouloir posséder l’œuvre, on finit par voler la vie.

On achète une Kahlo comme on s’achète un supplément d’âme.

Mais l’argent n’est pas un cœur, et la honte n’a que le prix de l’indécence.



Et pourtant… rien n’efface Frida


Ni les millions.

Ni les spéculateurs.

Ni les vitrines blindées.

Frida reste là, intacte, insolente, debout malgré la casse.

Elle nous regarde depuis ses autoportraits, frontale, dure, inébranlable.

Comme si elle disait :

« J’ai souffert pour vivre. Vous, vous payez pour oublier. »

Et dans ses yeux, encore aujourd’hui, on voit danser les couleurs du Mexique... et l’ombre d’une femme qui transforma la douleur en lumière.



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Lettre de Frida au marché de l’art
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