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Penser l’argent sans qu’il se dévoie

François Singer

Un article de

Depuis que l’homme enterre ses morts avec des bijoux rares, l’économie a une racine anthropologique : nous conférons de la valeur à la rareté. Les coquillages rares, le sel, l’or, les pierres précieuses… Ce ne sont pas seulement des biens matériels, mais des symboles de prestige, de pouvoir, d’échange. En ce sens, le capitalisme n’est pas une invention moderne, mais une constante humaine : il naît de notre désir et de notre imagination.

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François Singer

Pourtant, une ligne de fracture traverse l’histoire : l’argent doit-il être seulement un outil de circulation, ou peut-il devenir une source autonome de profit ?


Déjà, Aristote dénonçait l’« argent qui engendre l’argent », pratique contre nature. Au Moyen Âge, Saint Louis, fidèle à la doctrine de l’Église, condamne l’usure : l’argent n’est qu’un serviteur, le vrai capital réside dans le travail et le savoir-faire. L’idée est simple et puissante : il est légitime que l’argent accompagne le labeur, mais non qu’il prospère en dormant. Car l’argent sans effort, qui grossit de lui-même, est perçu comme une perversion de l’ordre naturel.



De Saint Louis à De Gaulle

Cette critique n’a pas disparu. Charles de Gaulle, au XXe siècle, affirmait : « La politique de la France ne se fait pas à la corbeille. » Dans sa bouche, la corbeille désignait la Bourse, lieu de spéculation court-termiste. Pour lui, l’État ne devait pas se soumettre aux caprices des marchés, mais maintenir une direction de long terme, au service de l’économie réelle. Il avait même imaginé une troisième voie : la participation.

Les salariés auraient dû partager non seulement les bénéfices, mais aussi une part de la gestion des entreprises, créant une communauté d’intérêts entre le capital et le travail.


Mais cette idée, trop audacieuse, n’a jamais trouvé son plein accomplissement.

Les patrons craignaient une dilution de leur pouvoir ; les syndicats, eux, redoutaient une perte de leur rôle de contrepoids. Car il faut aussi interroger les syndicats. Leur force est grande dans les grandes entreprises, là où siègent les comités d’entreprise et coulent les financements. Mais cette proximité, parfois, les rend complaisants avec le grand capital. Nul n'est insensible aux privilèges...


Dans les petites structures, chez les indépendants, dans les secteurs précarisés, ils sont faibles, voire absents. La représentation des travailleurs s’est donc concentrée là où le pouvoir était déjà fort, laissant de larges pans de la société sans voix.



Un contrepoint contemporain : Léon XIV

La critique n’appartient pas seulement au passé. Le pape Léon XIV, successeur de François, a récemment pris pour cible les grands patrons. Dans une interview du 14 septembre 2025, il rappelait qu’autrefois les dirigeants gagnaient « quatre à six fois plus que leurs employés », alors qu’aujourd’hui certains touchent « six cents fois plus ». Et de citer le cas d’Elon Musk, « en passe de devenir le premier billionnaire », pour conclure : « Si c’est la seule valeur qui compte, alors nous sommes en grand danger. »


En pointant du doigt ce dévoiement du capitalisme, Léon XIV s’inscrit dans la lignée de Saint Louis et de De Gaulle : rappeler que l’argent, sans limites ni enracinement, cesse d’être un instrument pour devenir une menace. Jadis, on disait une idole. 



Le "Marché" des dupes


Depuis Maastricht, l’abolition des frontières financières a accentué le déséquilibre.

L’argent circule désormais à la vitesse de la lumière, affranchi des États, tandis que le travail, lui, reste local, enraciné, soumis à la lenteur des corps. C’est la victoire du capitalisme financier sur le capitalisme productif. La spéculation a pris le pas sur l’investissement, et l’argent se reproduit lui-même dans un jeu abstrait où le réel devient secondaire. La soumission de la gauche, de la jeunesse et des syndicats à ce modèle brutal reste un profond mystère, comme si ceux qui devraient s’y opposer avaient fini par en devenir les otages consentants.


Et pourtant, la question demeure, brûlante : peut-on concevoir un capitalisme sain ? Un système qui s’appuie sur l’innovation, l’industrie, l’échange, mais refuse l’abstraction prédatrice de l’argent stérilement fertile ? Comme l’avait chanté Jean Ferrat, il doit bien exister un autre chemin que celui de la jungle du capitalisme ou du zoo du communisme. C’est ce choix, toujours différé, que l’histoire attend encore.


L’idée d’une troisième voie - ni capitalisme sauvage, ni collectivisme étatiste - continue de hanter notre horizon. Elle supposerait de renouer avec des principes simples : une finance strictement liée à l’économie productive, une participation réelle des travailleurs, et une réappropriation politique de l’argent au service du bien commun


Mais ces principes ne peuvent vivre dans un espace ouvert aux vents contraires de la spéculation mondialisée. Car ils supposent aussi des frontières, non pas comme des murs, mais comme des limites protectrices, capables de défendre l’économie réelle contre l’arbitrage permanent des capitaux. Autrement dit, une nouvelle souveraineté, celle qui remet l’argent à sa juste place : outil de la nation et non tyran des peuples.


Au fond, le capitalisme n’est que le miroir de nos passions humaines. Nous cherchons la rareté, nous désirons la reconnaissance, nous voulons accumuler pour transmettre. Mais si l’argent se coupe du réel, il cesse d’être un outil pour devenir une idole. Saint Louis le pressentait, De Gaulle le proclamait : l’argent doit être domestiqué.


Reste à savoir si nous aurons un jour le courage - et les moyens démocratiques, politiques et juridiques auxquels nous avons renoncé en 2005 - de tracer cette troisième voie que l’histoire n’a jamais voulu emprunter.

Un seul gagnant : l'indécence. 

Un seul perdant : la majorité silencieuse.



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Dialogue en quatre actes : entre Saint Louis et De Gaulle
Dialogue en quatre actes : entre Saint Louis et De Gaulle

Et si l’on faisait dialoguer Saint Louis et le Général de Gaulle sur la question de l’argent et de ses dévoiements ?

Le premier incarne la tradition médiévale de lutte contre l’usure. Le second, dans ses entretiens avec Alain Peyrefitte (C’était de Gaulle), dénonçait la bourgeoisie « avachie » et affirmait : « Les possédants sont possédés par ce qu’ils possèdent ».

Les propos de De Gaulle repris ici sont des citations exactes. Le reste appartient à la fiction — mais une fiction qui, parfois, éclaire mieux que le réel.

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